« Nouveau président cherche majorité désespérément »

mai 2017

Conformément aux derniers sondages et à l’anticipation des marchés au cours des quinze derniers jours, Emmanuel Macron vient d’être assez confortablement élu Président de la République avec plus de 66% des voix. Plusieurs constats s’imposent suite à cette élection : le premier est que l’on est assez loin d’un vote massif d’adhésion au programme de Macron, l’enthousiasme est resté mesuré donc le Président n’aura pas beaucoup de jours d’état de grâce. Désormais, la question est celle de la majorité politique dont disposera Emmanuel Macron à l’assemblée nationale. Ayant fait campagne sur la volonté de s’affranchir de la logique partisane des partis politiques (et en soi c’est sa principale victoire), les élections législatives seront plus complexes, le poids du local étant important et le vote utile moins évident lorsque l’on élit un député de proximité. Bref on devrait découvrir en juin que les partis politiques ne sont pas morts, d’où une situation politique plus compliquée pour ce prochain quinquennat. Le premier signal sera donné avec la nomination du prochain premier ministre après la prise de fonction qui aura lieu le 14 mai. En raison d’un PS très affaibli, structurellement divisé, il a tout intérêt à appeler un premier ministre « très politique », mais compatible « gauche-droite » du côté du Centre, voire des Républicains. On peut citer quelques noms : Borloo, Bertrand, De Villepin où les moins connus Edouard Philippe et la députée européenne Sylvie Goulard (assez peu probable). Pour les marchés financiers, ces options restent favorables puisqu’il est acquis que la prochaine majorité sera plutôt pro-business et pro-européenne.

Sur l’ensemble des places financières, cette première semaine de mai a été haussière : +2,79% pour l’Eurostoxx50, +3,13% pour le CAC 40 et +2,24% pour le DAX. Le S&P 500 affiche aussi une hausse de +0,63% et le Nasdaq de +0,88%. Le NIKKEI a marqué une progression à +1,30%.

L’assemblée introuvable de l’apprenti-Président « Schumpetérien ».

Eu égard à ce qui vient de se passer sur le plan politique, à savoir une destruction méthodique et scientifique des partis politiques existants, nous sommes tentés d’y tracer un parallèle sur le plan économique. Dans ce sens, Macron serait à classer en économie au sein des disciples de Schumpeter, comme l’indique dans une précédente note l’économiste Patrick Artus. La théorie de Schumpeter est que le système capitaliste se développe grâce à l’innovation et au progrès technique à travers le phénomène de « destruction créatrice ». L’entrepreneur (j’aime l’entreprise !) est l’acteur de cette croissance économique, il en accepte le risque et est à la recherche du profit maximal. L’innovation lui permettra d’obtenir un monopole temporaire sur le marché. Il sera le seul pendant un certain temps à pouvoir produire à forte rentabilité. C’est « la donnée fondamentale du capitalisme et toute entreprise doit, bon gré mal gré, s’y adapter ». La croissance est un processus permanent de création, de destruction et de restructuration des activités, mouvements qui sont à l’origine de la formation des cycles économiques. Macron sera donc moins Keynésien que les gouvernements de gauche en général, mais va travailler d’un point de vue économique autour des thèmes de la concurrence, de la modernisation du marché du travail, des investissements en formation et en R&D. Ceci pourrait être considérée comme une approche positive pour les marchés financiers.

La semaine verra si Emmanuel Macron présente des candidatures dans l’ensemble des circonscriptions, à savoir les 577, où s’il ne présente pas de candidats en face de députés proches de son mouvement. D’une semaine à l’autre, il a déjà changé de ligne directrice puisqu’il demandait auparavant à ce que les candidats désirant se placer sous l’étiquette « La République en marche » démissionnent de leurs partis d’appartenance, mais désormais il accepte sans cette démission. Cela change assez peu la donne puisque les deux partis visés par ce débauchage (PS et les Républicains) ont déjà annoncé que de tels comportements entraîneront immédiatement l’exclusion des impétrants. Le jeu sera compliqué d’autant que Les Républicains s’ils restent unis (rien n’est moins certain d’où l’intérêt de Macron d’aller chercher dès maintenant un Premier Ministre Républicain pour semer un peu plus le trouble ! on n’est pas le fils spirituel de Hollande pour rien !) ont une très forte probabilité d’être majoritaire et d’imposer alors une vraie cohabitation.

En effet, des premières simulations donnent une chambre dominée à un peu plus de 50% par l’alliance faite entre LR et UDI. Les candidats issus de « En Marche », qui auront de fait un problème d’expérience et de reconnaissance dans leurs circonscriptions n’obtiendraient qu’environ 35% des députés, soit un peu plus de 200. Le Parti Socialiste ne serait plus crédité qu’entre 30 et 45 députés, soit un peu au-dessus de la France Insoumise (entre 20 et 30). Enfin, eu égard au mode de scrutin et à un fonctionnement même moyen du front républicain, le Front National n’obtiendrait qu’entre 5 et 10 députés. En fait le bon score des Républicains et le faible score du PS s’expliquent par un grand nombre de duels directs FN /LR, gagnés par LR, le PS ne pouvant pas se maintenir dans bien des cas (12,5% des inscrits donnent environ un score brut de 20% dans l’hypothèse d’un taux de participation de 60%). Au final, ce qui risque de se passer est clair : pas de majorité immédiate absolue à l’issue de ces législatives mais possibilité ensuite pour Macron de constituer une vraie majorité en allant chercher ce qui lui manque à la fois chez les socialistes très affaiblis et surtout chez les plus ouverts des républicains, il y en aura !

Vers un marché plus incertain ?

Plusieurs dictons pousseraient à sortir en ce moment du marché. Le plus connu est « In may, sell and go away », l’autre étant « acheter la rumeur et vendre la nouvelle » qui s’appliquerait à l’élection d’Emmanuel Macron. La réaction des marchés hier allait dans ce sens puisque le CAC a pu perdre dans la journée plus de 1%. Après un début d’année marqué par des indices à +11%, une pause pourrait ainsi se justifier d’autant que nous sommes sur plusieurs indices assez proches de très fortes résistances techniques (cf. par exemple 5500 points pour le CAC 40, 3725 pour l’Eurostoxx). L’explication donnée ci-dessus sur le plan politique pourrait se traduire par un regain de volatilité au fur et à mesure de l’avancée de Macron. Néanmoins d’un point de vue fondamental, il est indéniable que la prochaine orientation du gouvernement française sera favorable aux entreprises et aussi au patrimoine (soutien aux actions françaises avec passage à une taxation forfaitaire à 30% des revenus du capital et suppression de l’ISF sur les actifs financiers, baisse des impôts des entreprises et des ménages). Une logique favorable de flux devrait aussi se mettre en place. De nombreux investisseurs internationaux regardaient l’Europe et sa dynamique macroéconomique avec intérêt mais étaient freinés par le risque politique. La levée de cette hypothèque pourrait contribuer à soutenir le marché par la repondération en actifs européens et en particulier français.

Toutefois pour justifier de nouvelles progressions importantes des indices, un relèvement des profils bénéficiaires des entreprises est nécessaire. Dernier élément positif en mai, le paiement des dividendes qui est propice aux réinvestissements. En conclusion, nous maintenons un optimisme sachant qu’une grande partie de la hausse est déjà actée.

Source : Lettre hebdomadaire 360 Hixance am n°234, lundi 9 mai 2017 – Jean-Noël VIELLE – Directeur de la gestion

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