Dans l’attente d’un G20 crucial !

novembre 2018

Les prochaines semaines vont être marquées par des réunions importantes, d’abord le G20 en fin de semaine, entre le 30/11 et le 1/12, et ensuite les réunions des banques centrales. Dans le contexte actuel très morose du comportement des marchés financiers, ces réunions seront analysées en profondeur et influenceront la stratégie des investisseurs sur le fin de l’année. Donald Trump est déjà monté au créneau en demandant que la Fed s’engage dans un mouvement de baisse des taux, ce qui reste à ce stade très peu probable, même si cette dernière commence à intégrer le freinage de la croissance américaine. Enfin, le G20 pourrait s’intéresser à l’évolution du baril de pétrole dont le violent décrochage est un élément explicatif de la baisse des marchés.
Lors de ce G20, Donald Trump devrait avoir des discussions bilatérales avec plusieurs dirigeants dont le Président chinois, celui de la Commission européenne et le Premier ministre japonais. La guerre commerciale sera au centre des rencontres. L’enjeu est simple : une nouvelle hausse des droits de douane US est prévue début janvier sur des importations chinoises et l’Europe et le Japon s’attendent à des droits de douane sur les importations américaines d’automobiles et de composants.
Trump restant assez imprévisible, un scénario est difficile à écrire d’autant qu’il existe des divergences de vues au sein de l’administration américaine. La raison voudrait que les élections américaines passées, Trump affaibli, cherche à apaiser les tensions avec la Chine, mais le représentant au commerce continue à dénoncer la Chine pour des « pratiques déloyales, déraisonnables et qui faussent le marché » en matière de transfert de technologie, de propriété intellectuelle et d’innovation. Enfin nous reviendrons sur quelques récentes données économiques en zone euro qui ne sont pas très favorables. Les marchés financiers ont encore connu un fort mouvement de baisse cette semaine : -1,37% pour l’Eurostoxx50, -1,56% pour le CAC 40 et -1,31% pour le DAX. Le Dow Jones affiche une baisse plus importante de -4,44% et le Nasdaq de -4,26%. Enfin, le Nikkei a très légerement diminué de 0,16%.

L’équation du prix du baril de pétrole : trois mauvais acteurs d’un très mauvais film

Dans l’incertitude qui domine en ce moment les marchés financiers, l’évolution du prix du baril de pétrole occupe une place de premier plan. Ce vendredi, le prix du WTI est revenu tout proche des 50$ le baril, enregistrant une diminution de plus de 33% par rapport à début octobre. Il est toujours étonnant de voir que cette baisse n’est pas répercutée à la pompe, petit message en direction des gilets jaunes. L’évolution du prix du baril de pétrole est reliée à des considérations économiques mais aussi très politiques. Cela ne doit pas nous rassurer quand les décideurs s’appellent Trump, Poutine et Mohammed ben Salmane. Ces trois pays peuvent aujourd’hui produire chacun au moins 11 millions de barils par jour, soit plus d’un tiers de l’offre mondiale combinée et plus que la totalité de la production de l’Opec. Ces trois dirigeants ont toutefois des stratégies très différentes. L’Arabie saoudite souhaite une hausse des prix du pétrole après la récente chute et elle serait disposée à diminuer sa production pour atteindre cet objectif. Pour que son budget soit à l’équilibre, un prix autour des 80$ est nécessaire voire plus pour financer de nouveaux grands projets et moderniser l’économie. Le meurtre du journaliste américain en Turquie complique singulièrement la donne. Il ne faut pas avoir beaucoup d’imagination pour penser que Trump a monnayé un assouplissement de sa position sur ce crime contre le fait que l’Arabie Saoudite laisserait filer à la baisse le prix du baril en augmentant sa production. En effet, les Etats-Unis souhaitent un baril plus bas pour soutenir l’économie américaine, d’où aussi une certaine mansuétude sur les sanctions contre l’Iran (dérogations de l’embargo vis-à-vis de certains pays). La Russie poursuit une stratégie intermédiaire car elle voudrait des prix plus élevés pour stimuler une économie dominée par les ressources naturelles. Moscou est néanmoins moins dépendant du pétrole que Riyad et Poutine a exprimé son inquiétude quant à une hausse excessive des prix, estimant qu’elle pourrait entraîner des approvisionnements concurrents, dont le schiste américain. Depuis deux ans, Poutine a une alliance pétrolière avec Riyad pour jouer aussi un rôle politique plus important au Moyen-Orient. Donc dans la guerre qu’il livre contre Washington, Poutine pourrait défendre une réduction de la production de pétrole, qui va dans son intérêt et de celui de MBS. Ces discussions devraient donc avoir lieu en fin de semaine dans le cadre du G20.

Une économie européenne en ralentissement ?

Selon les données préliminaires de novembre, le climat des affaires recule en zone euro avec une stabilisation en France et en Espagne et des données en retrait en Allemagne et en Italie. En Italie, les doutes sur l’efficacité gouvernementale posent un problème de confiance et clairement l’économie est au bord de la récession. En Allemagne, les problèmes sont différents mais l’économie est touchée par des doutes sur le système bancaire, la difficulté du secteur automobile et surtout par la baisse de la demande extérieure.
En zone euro, le freinage de la croissance se confirme en passant de +2,5% en 2017 à +2,0% en 2018 en raison d’une moindre croissance de la demande extérieure et d’aspects spécifiques au plan local. Ainsi, selon les enquêtes préliminaires pour novembre, la confiance des directeurs d’achat a reculé et se situe au plus bas niveau depuis fin 2014. Ces données font que la croissance de la zone euro au dernier trimestre pourrait être de l’ordre de 0,3% de trimestre à trimestre, après +0,4% pour les deux premiers et +0,2% au troisième.
L’Allemagne est dans une position délicate d’abord en raison de questions politiques, la succession d’Angela Merkel s’annonce difficile. Sur le plan économique, les derniers chiffres publiés montrent une modération des carnets de commande en provenance de la Chine, de l’Italie et de la Turquie. Elle devrait aussi être touchée par l’ensemble des contraintes qui vont peser sur l’industrie automobile. De façon plus anecdotique mais cela va freiner la croissance sur ce dernier trimestre, le bas niveau du Rhin créé des problèmes de logistique à l’industrie allemande avec un prix du transport fluvial multiplié par 5. En France, le premier semestre a été impacté par la hausse de la pression fiscale au T1 et par la grève dans le transport ferroviaire au T2. La croissance a rebondi au T3 signalant un retour à la normale, soit un rythme de croissance dans une fourchette 1,5-2% en rythme annualisé. Le risque est maintenant celui d’une généralisation du conflit des gilets jaunes à une période particulièrement importante pour la consommation. Evidemment, la situation la plus délicate est celle de l’Italie. L’économie de ce pays est tombée en stagnation au T3, après trois années de reprise solide. Les entreprises critiquent de plus en plus le gouvernement qui commence à montrer ses divisions. Le risque d’enlisement de l’économie italienne est aujourd’hui très élevé.

Une économie américaine en phase d’atterrissage ?

L’alerte que les marchés intègrent désormais tient à la question de la soutenabilité de l’économie américaine et à son risque de repli. L’indicateur qu’il faudra suivre est celui des nouvelles inscriptions au chômage qui pourrait commencer à montrer des signes de baisse, avec un signal de récession. Point inquiétant d’ailleurs cette semaine, la confiance des constructeurs a fléchi de 8 points en novembre, son plus fort recul depuis 2014 et les mises en chantier ne sont plus très élevées depuis quelques mois, tout comme l’investissement des entreprises.

Un possible rally sous certaines conditions ?

En conclusion c’est ce qui va être décidé au sein du G20 et en marge avec les discussions entre Donald Trump et le Président chinois qui va donner la tonalité de l’évolution des marchés pour la fin de l’année. Notre conviction est que si les éléments logiques et rationnels l’emportent, alors nous pourrions assister à un rally de fin d’année justifié par des valorisations devenues un peu plus attractives surtout en Europe. Les négociations sur le Brexit semblent aller aussi dans un sens favorable. Pour le reste, Trump a les cartes en main et tout dépend de son souhait de passer des fêtes de fin d’année agréables avec Melania. Mais attention si les discussions s’enlisent, et certaines analyses techniques vont dans ce sens, nous pourrions assiter à une accélération baissière de l’ensemble des indices.

Source : Lettre hebdomadaire n°50, lundi 26 novembre 2018 Jean-Noël VIEILLE – Chief Economist HPC membre du Groupe OTCex

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